En novembre, vous étiez nombreux (enfin j’espère) à suivre les aventures de PB et TD à Béhobie. Aujourd’hui, nous vous emmenons vers de nouvelles aventures : PB, TD et leurs amis kenyans à Paris !
Debout à 5h15 pour un petit déjeuner traditionnel, sans pâte ni sucre lent supplémentaire. Je me dis que cela fait 4 jours que je mange des pâtes midi et soir, et que j’ai suffisamment rechargé mes batteries en sucres lents.
2 ans que j’attends de courir un marathon avec Monsieur Patrick. A force d’attendre, j’ai oublié qu’un marathon pouvait être dur, notamment Paris, dont je n’ai pas foulé les 42,195 kms de bitume depuis 2005.
Mais aujourd’hui c’est le bon jour. Rendez-vous est pris avec Jean-François (GRANDVEAU) et Patrick (BERNARD) sur le quai du RER de Torcy à 6h24 (cette précision est importante si je ne veux pas louper mon RER).
A 7h08, après s’être quitté avec JF qui court sous les couleurs de la RATP et nous celles de l’AVH (Association pour les déficients visuels), on est sur les Champs Elysées, lesquels sont quasiment déserts. Deux photos une de face, une de dos et on file à la recherche du bus Handisport. Après quelques errements, on retrouve enfin les autres binômes, dont certains que j’ai pu côtoyer à Béhobie.
Il fait frisquet mais qu’importe. Tout le monde se prépare dans la bonne humeur, tandis que les handis en fauteuil sont déjà en train de s’échauffer. Quelques hésitations vestimentaires du style chaussettes de contention ou pas pour Patrick, qui ne veut pas revivre son cauchemar crampesque (néologisme dédié à Patrick et ses gardes du corps de l’Ecotrail). Patrick fait le plein de gel (anti-oxydent, coup de fouet, …), qu’il met dans sa toute nouvelle ceinture de survie.
On a encore un peu de temps avant le départ, prévu à 8h35, on en profite pour aller à l’Hippopotamus du coin, histoire non pas de dévorer une viande (quoique avec Patrick, il faut être prudent et ne pas le laisser se mettre à table), mais plutôt d’utiliser leur vespasiennes et plus si affinités.
Quelques allers retours en guise d’échauffement, puis le départ est donné à 8h35, juste derrière les fauteuils qui nous laissent sur place en quelques secondes. On descend les Champs, Patrick de la main droite et l’appareil photo de la main gauche, afin d’immortaliser cette descente, sauf qu’à ce moment-là, je n’ai pas mis l’appareil en position caméscope (c’est balaud !).
De droite et de gauche, les encouragements fusent à note intention. Normal, on est quasiment seuls au monde avec les autres bigleux, tandis que le reste des 35.000 coureurs est bloqué pendant 10 mn derrière la ligne de départ, dans une température qui avoisine les 5-6°.
Bien évidemment, on s’emballe un peu (entre 5’00 et 5’08 au kilo, alors que l’on devait se caler sur 5’15. Rue de Rivoli, les orchestres nous accompagnent en musique, en même temps que Tony et JB (son guide) nous doublent. On les laisse filer, nous ne devons pas nous dévier de notre objectif qui est de franchir la ligne d’arrivée en 3h45.
Avant d’arriver sur la Bastille, Patrick qui connaît le parcours par cœur m’indique que l’on ne va pas tarder à se faire doubler. Sa prédiction s’avère exacte : un essaim de kenyans et d’éthiopiens nous double à plus de 20 kms à l’heure alors qu’on n’a pas encore réduit notre allure et qu’on s’envole vers la ligne d’arrivée à près de 12 à l’heure. La caméra qui cette fois-ci est bien en position « ON », s’en souvient encore, j’arrive à la tenir fermement de la main gauche en dépit des turbulences subsahariennes qui nous dépassent … On en profite pour se mettre dans l’axe de la caméra de France 3, histoire de pouvoir se la péter un peu plus tard (la preuve !).
On laisse sur notre droite le zoo de Vincennes, puis le Château du même nom. Les 10 premiers kilomètres sont avalés à un rythme de sénateur ou presque (51’12).
Quelques bonnes bourrasques nous rappellent toutefois que les conditions météos du jour ne sont pas des plus faciles et que ce marathon ne sera pas une partie de plaisir pour tout le monde.
A partir du 14ème, je sens un échauffement sous le pied droit, les mollets commencent à me faire mal. Faut dire que mes chaussettes de contention sont descendues au niveau des chevilles depuis près de 10 bornes.
Les meneurs d’allure du 3h00 nous doublent sans trop difficulté, mais on sent tout de même qu’ils sont un ton en dessous par rapport aux athlètes des hauts plateaux.
On passe les 20 kms (53’03 sur la 2ème tranche de 10 kms) puis le semi en 1h50, avec plus d’une minute d’avance sur notre plan de marche.
On laisse la Bastille derrière nous et on arrive sur les quais et ses difficultés, j’ai nommé ses souterrains et ses remontées au grand jour. N’empêche que tout le monde n’a pas rencontré les mêmes difficultés, l’ami Patrick criant à tue-tête dans les souterrains sa joie de courir ce marathon, sans oublier de me donner les bons conseils dès qu’on aborde les remontées (petites foulées et bras près du corps).
Comme un métronome Monsieur Patrick avale les kilomètres au même rythme ou presque que les gels (bon j’exagère un peu, je l’admets !). N’empêche qu’il n’a ni crampe ni coup de mou lui !
Les kilomètres deviennent difficiles et le rythme se ralenti légèrement, avec une moyenne au kilo qui chute entre 5’20 et 5’25. J’avoue que je ne fais pas le fier, bien calé dans les traces de mon guide (…). La corde se tend de plus en plus m’obligeant fréquemment à desserrer le nœud coulant qui me relie à mon coach. Notre avance sur le chrono fond inexorablement.
Le 30ème arrive avec un passage en 2h39 et 54’50 pour notre 3ème tronçon de 10 kms. On s’attend à bénéficier d’une boisson énergisante au 30ème, histoire de se requinquer et de repartir de plus belle. Que nenni, nenni, il n’en est rien.
Je n’ai toujours pas vu le mur du 30ème, mais lui il a dû me voir, m’obligeant à ralentir et à franchir l’obstacle. Mes mollets se durcissent, les jambes se font lourdes et je commence à avoir une fringale. Qu’importe il faut continuer et essayer de maintenir notre rythme. Patrick, qui doit en avoir marre de me tirer comme un boulet décide de partir seul avec la corde et rien au bout. En effet, à force de tendre la corde, le nœud coulant a fini par rendre l’âme et se défaire de mon poignet.
Le prochain ravito en Powerwade se trouve un peu plus loin, au 34ème, d’où un arrêt au stand et un passage au kilo en 5’59 (notre record du jour). J’en profite à ce moment-là pour remonter mes bas de contention, ce qui permet très rapidement à mes mollets de se sentir mieux, même si les cuisses ne partagent pas ce point de vue.
Au 36ème, quelques binômes AVH nous attendent et nous accompagnent sur près de 2 kms, nous apportant réconfort et encouragement. Ils nous informent que Tony et JB ne sont pas très loin devant et en difficulté. On part à la chasse et on avale ces 2 kms en 5’18 et 5’08. La machine de guerre, ou ce qu’il en reste, est lancée. Au 38ème on dépasse le binôme Tony - JB, tel deux kenyans à la Bastille (cf ci-avant).
La fin s’annonce dure, mais rien n’y fait, on sent que l’on peut rentrer dans notre objectif. Il n’y a rien à dire, la course sur route ce n’est pas du trail et le chrono est toujours présent à l’esprit.
On double un tas de concurrents. La fin approche, il faut garder de la lucidité pour éviter les autres coureurs, rappeler les consignes de course, composées de pavés et de virages, penser à sortir l’appareil photo pour immortaliser un finish au sprint.
On passe au 40ème en 3h33’33 (si si !!) et on boucle nos 10 kms en 54’28, en négative split (enfin par rapport aux 10 bornes précédentes).
Pour le finish, on y arrivera tant bien que mal, et ce n’est que sur les derniers hectomètres que j’arrive à dépasser mon guide du jour et à tendre un peu la corde dans l’autre sens. En revanche, pour la vidéo s’est encore loupé, trop de paramètres à gérer en même temps, cela en est trop pour moi !
On franchit la ligne d’arrivée en 3h44’45, remplissant notre objectif du jour, tous les deux ravis de cette superbe course.
Quelques photos sur la ligne d’arrivée, histoire de montrer qu’on l’a fait, avec le sourire et la jambe leste, et on rejoint la tente Handisport où boissons, petits gâteaux et les autres binômes nous attendent.
J’en ainsi terminé de mon 10ème marathon, sans gloire ni classement : le guide n’existant pas pour l’organisation du Marathon de Paris, mais avec la joie d’avoir couru en duo un marathon d’exception et dans des conditions rares que je souhaite à tout le monde.
Un grand merci à Patrick pour son soutien pendant cette course et pour son gel coup de fouet à un moment stratégique. Ce dernier, qui a toujours un mot gentil, et personne ne me contredira, me dira que cette course l’a réconcilié avec le marathon, ce qui me fait extrêmement plaisir, sauf que s’il a eu autant de plaisir, c’est probablement parce que la corde n’était pas tendue dans le bon sens …
De Thierry, votre envoyé très spécial et en léger différé du Marathon de Paris
Jean François G. participait aussi au Marathon Temps réel : 03:53:17 Temps officiel : 03:56:53