25 septembre 2014 4 25 /09 /septembre /2014 16:35

... à chacun son Tours !

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Samedi après-midi,  en arrivant  à l'hôtel Ibis centre de Tours, Gilbert et moi avons la surprise de découvrir que nous sommes logés dans le même hôtel que les coureurs élites kenyans et éthiopiens. Ils sont environ une quinzaine. Ils sont venus rafler les primes des places d'honneur sur le marathon, le 10 et le 20 km. Notre très faible niveau d'anglais rend difficiles les échanges. On est curieux de connaître leurs chronos sur marathon. Devant l'incapacité de capter ce qu'ils nous disent, l'un d'eux sort son portable, compose un numéro, le tend à Gilbert en lui criant "ask, ask". Gilou éberlué prend le téléphone et comprend après quelques hésitations qu'il est en communication avec la sœur du coureur  que celui-ci appelle en  Éthiopie spécialement pour nous... Elle parle bien français. Nous apprenons  alors que ces athlètes courent entre 2h16' et 2h33'. Le vainqueur du marathon est probablement devant nous…

 En traversant à pied une partie de la ville, nous retirons nos dossards sur le stand de la Fondation Orange. Celle-ci prend en charge les inscriptions de tous les athlètes handisports. Nous y rencontrons la déléguée Mécénat et Solidarité de la région Centre-Haute Normandie. Impressionnée que des déficients visuels puissent courir, elle nous interroge et nous prend en sympathie : elle nous trouve "rigolos". Faut dire qu'avec Gilbert…J !

On nous annoncera plus tard qu'il y  a près de  90 compétiteurs handisports sur les trois courses. Nous serons six binômes non et malvoyants sur la ligne de départ du marathon aux côtés des joelettes et des fauteuils.

Sur le village expo nous faisons la connaissance de Yohann Diniz, parrain de la manifestation. Pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est le champion d'Europe et nouveau recordman du monde en août dernier du 50 km marche en 3h32', les connaisseurs apprécieront !! Le lendemain sur la ligne de départ il viendra nous saluer en nous souhaitant bonne course…

Après les réjouissances d'avant course et une pasta party musicale nous sommes fin prêts.

Tours 1

 Comme sur beaucoup de courses, en tant qu'athlètes handisport, nous prenons le départ 10 minutes avant le flot des 3600 partants. Ce dimanche matin, à 8h50, la température est déjà proche de 20°, il va faire chaud ! Le départ est impressionnant, le public massé sur les deux côtés de la route durant les trois premiers kilomètres est extrêmement chaleureux. Les gens applaudissent, crient leurs encouragements sans relâche. On en frissonne !

 Peu avant le 4ème kilo, un groupe de six coureurs africains nous passent comme des avions, ce sont nos amis de l'hôtel Ibis ! Les autres adversaires sont déjà loin derrière.

 

Le calme revient quand nous empruntons les rives du Cher. Gilbert me décrit inlassablement les paysages du bord du fleuve, c'est magnifique ! Jusqu'au 20ème kilo, le flot des concurrents nous double sans cesse, le ballon des 3 h et sa horde, puis celui des 3h15 et 3h30.

Le soleil commence à chauffer, on recherche les zones d'ombre, on s'arrose régulièrement, on profite des brumisateurs, ça rafraichit ! Au semi nous passons en 1h56'52", conforme à notre objectif du jour : finir en moins de 3h55'.

 À partir du 22ème, Gilou ressent une douleur à son tendon d'Achille. Au ravito du 25ème, on s'arrête un peu plus longtemps.  Gilou prend le temps d'arroser son tendon avant de repartir. Nous traversons alors les magnifiques jardins du château de Villandry qui accueillent 350 000 visiteurs par an. Gilbert toujours concentré me décrit les potagers, les fleurs, les arbres majestueux, c'est superbe ! Les senteurs des différentes essences se mélangent aux parfums des fleurs. Il faut rester tout de même vigilant, ça zigzague dans tous les sens, sur le sable des allées, les pavés et les trous,  avant de ressortir du parc.

 Au 30ème kilo, on s'arrête toujours un peu plus longtemps, on récupère, on mange, on boit, Gilbert s'arrose à nouveau les tendons et ischios, il commence à ressentir des prémisses de crampes. Pour ma part, je suis bien malgré une certaine fatigue naissante. Normal, on est au 30ème ! On passe en 2h50'. Notre allure baisse mais on peut encore prétendre finir sous les 4h…

On double déjà depuis un bon moment quelques concurrents téméraires partis vraisemblablement trop vite. Ils nous avaient déjà repris 10' puisque nous étions partis 10' avant eux.

Ce qui nous impressionne et nous fait réellement frissonner c'est toujours la ferveur du public. Chaque village traversé, une petite dizaine sur l'ensemble du parcours, nous procure des sensations fortes. Massés sur plusieurs rangées parfois, les spectateurs vocifèrent, scandent nos prénoms (ils sont écrits sur les dossards). Ce n'est que le marathon de Tours, qui plus est la première édition, et pourtant on se croirait sur une course espagnole réputée pour l'enthousiasme démesuré de ses aficionados. On en redemande !!

Au 31ème Gilou commence à avoir un coup de moins bien. Ses ischios lui font mal et de petites crampes sont maintenant présentes, on ralentit, on marche sur 50 m et on repart ainsi jusqu'au 35ème. Il est le bienvenu ce ravito. Il doit faire 27° peut-être plus, on dégouline. On doit s'arroser davantage encore, bien s'hydrater et se nourrir. Le parcours n'est pas trop difficile mais de nombreux  faux plats montants se succèdent.


On repart ! Maintenant on se fout du chrono, on sait que c'est cuit pour moins de 3h55' et pour moins de 4h c'est pas gagné ! Gilou s'est refait une santé et reprend le rythme. Ça dure pas longtemps ! Ma fatigue naissante du 30ème se transforme maintenant en une grosse défaillance. C'est maintenant mon tour, je prends le "mur" en pleine tronche, j'ai mal partout, je n'avance plus, je m'arrête net, les mains sur les cuisses en pliant les jambes, ça soulage ! On est au 36ème et je repars en marchant encouragé par Gilou qui lui va beaucoup mieux. Le 37ème est loin, je suis vidé, plus rien dans les guiboles, la fin va être interminable ! On trottine, on marche, je galère comme ça jusqu'au 39ème.

Au 38ème, sur le bas-côté de la route un papy, isolé, assis sur une chaise nous prodigue  ses chaleureux encouragements : "Bah mon vieux, heureusement que vous faites pas le tour de France ! vous seriez pas prêts d'arriver, hein !"  Dans la tourmente ça nous fait tout de même sourire…

Il reste encore un peu plus de 3 kilomètres ! Miracle, mes forces reviennent. Je me sens mieux, on retrouve notre rythme de 5'30" au km, on double sans cesse. Des concurrents marchent d'autres sont assis par terre. Du 40ème au 42ème le public est encore là.

Le dernier kilo ! C'est "l'Alpe d'Huez", les spectateurs empiètent sur cet immense boulevard d'arrivée. Ils ne nous laissent plus qu'un passage de 3 m de large. Ça devient compliqué pour doubler. Les hurlements et la musique nous galvanisent ! Le ballon des 4h est juste derrière nous, à 100 m. On accélère, Gilou me crie : "Allez Pat on donne tout maintenant" ! On s'arrache et on termine en 4h10' 43". Ouf, ça y est c'est enfin fini ! Que c'est bon quand ça s'arrête !

Tours 2

Peu après l'arrivée, Marie-Françoise la déléguée Fondation Orange nous aperçoit, vient à notre rencontre en courant et nous invite sur le podium des officiels : elle nous présente le président du Conseil Général d'Indre et Loire (co-organisateur) et le directeur de la course, marathonien et organisateur aussi du nouveau marathon "la Saharienne" au Tchad. On nous prend en photo avec les maillots de la Fondation Orange avant de repartir.

Même si on a "dégusté" chacun notre tour, ce marathon restera un grand souvenir, un accueil exceptionnel, des bénévoles impliqués, un parcours très sympa sur les bords du Cher et de la Loire. Avec 14 000 participants sur le 10 et 20 km et 3500 sur le marathon il est certain que les

 20 000 participants seront atteints l'an prochain. Une sortie club en prévision… ?

Tours 3

Retour au calme et repos bien mérité !

 

   Merci Gilbert pour ce partage dans l'effort, ton attention et toutes les descriptions non seulement celles du parcours mais aussi celles de la ville et tout le reste.

Ah oui, avant de finir : ton p'tit coup d'blanc au ravito du 17ème ne serait-il pas la cause de tes crampes ? 

   Une petite vidéo sur : http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre-et-Loire/Sport/Autres-Sports/n/Contenus/Articles/2014/09/21/VIDEO.-Tours-Les-departs-du-marathon-des-10-et-20-km-2053854

 

 

commentaires

M
<br /> Bravo à vous deux pour cette course "pas banale" et ce récit très réaliste et drôle, qui donne envie de participer à cette belle course. Dis-moi Patounet, c'est la petite tape sur la fesse qui<br /> t'a manqué je suis sure pour passer sous la barre des 4h ?   En tout cas, bonne récup à vous deux maintenant !<br />  et merci d'avoir si bien décrit ce week-end sportif de partage et d'émotions <br />
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D
<br /> Beau récit pour une belle région<br /> <br /> <br /> Ils sont vraiment sympas ces tourangeaux ....<br /> <br /> <br /> Ah , vous ignoriez que je suis né à Amboise (37) vous savez ...le chateau de François 1er, le Clos Lucé de léonard de V !<br /> <br /> <br /> Qu'il est sympa ce denis  (sic)<br />
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L
<br /> Tu sais quoi Patrick ? Rien qu'à te lire j'ai senti le mur ! Bon, vous n'avez pas " craqué" en même temps et vous avez pu vous encourager mutuellement, c'est chouette.<br /> <br /> <br /> merci pour ce récit vivant et enjoué en bravo à vous deux !<br />
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L
<br /> le p'tit coup de blanc au km 17 ... ou la p'tite pinte de la veille (cf photo 1) ?<br /> <br /> <br /> Et encore, on sait pas tout ...<br /> <br /> <br /> Bonne récup' ... je parle du foie, bien sur ! pour les jambes, je ne suis pas inquiet, 42 bornes pour vous, c'est un échauffement ;-)<br />
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