Parce que toutes les histoires de course ne finissent pas forcément bien…
Le week-end de la sortie-club, donc du marathon pour moi, est enfin là après une prépa rondement menée mais qui me laisse un goût d’irrégularité sur l’allure travaillée. Je suis très contente de partager pour la première fois cet évènement avec les copains. Tout le monde me promet un beau chrono, un sub 4h.
Le matin, on se retrouve au petit déjeuner avec les copains, tout le monde est en tenue, les viennoiseries ne trouveront pas de succès auprès de nous. Le buffet est bien garni est adapté à une clientèle de runner.
Nous nous retrouvons ensuite dans le hall pour prendre le train qui nous amène à notre lieu de départ, les semi-marathoniens dans un train, les marathoniens dans un autre.
Sur place, je me glisse dans le sas des 4H, avec Emmanuel, Hervé, Thierry et François.
Le coup de feu est donné avec un peu de retard, et on s’élance dans le village, aux maisons typiques de l'architecture du nord. Les gens nous encouragent, puis c’est une succession de petits villages et de routes de campagnes. J’apprécie le fait d’être encouragée par mon prénom, ça fait du bien !
Très vite je me rends compte que je n’ai pas de bonnes sensations. Je tourne entre 5’40 et 5’30 du kilomètre, mais plus souvent proche des 5’30. Je ne suis pas inquiète, j’ai travaillé cette allure lors des séances de fond du samedi. Les garçons sont devant moi, mais ne s’éloignent pas, je les ai toujours en ligne de mire. Le meneur d’allure du 4h me double. Je ne comprends pas. A l’allure que je tiens il est sensé être derrière moi ! Les gens s’interrogent aussi, il n’est pas régulier. ça me rassure, mais quand même, psychologiquement le voir devant moi m’inquiète. J’ai mal au dos, je subis ces kilomètres qui s’égrainent. ça va être long.
On arrive le long de la Deûle. Une grande ligne droite, monotone. Je remercie les tours dans la ZI pour entrainer le morale face à ces parcours sans intérêt.
20ème kilomètre, c’est le second souffle. Je me souviens qu’à Lyon c’était chouette, je doublais tout un tas de coureurs qui n’étaient pas assez entrainés. Là ce n’est pas le cas, tout le monde garde son rythme. Je double quand même Thierry et Hervé, je me sens mieux, je me rapproche même du meneur d’allure.
Kilomètre 24, je commence à être dans le dur. Quoi déjà ? Mais non c’est trop tôt ! En plus j’ai besoin d’aller aux toilettes. Je trouve un petit coin dans la verdure et ressors rapidement. Je ne vois plus le meneur d’allure. Je repars toujours dans le dur, l’allure faiblit mais reste dans ce que je voulais maintenir. Je pense à l’arrivée, aux copains qui sont là bas, je commence à compter les kilomètres qui restent, à les comparer aux parcours que je connais…
Kilomètre 33 une côte s’annonce. Qui a eu l’idée de mettre des côtes dans un marathon à cet endroit ! Je l’aborde, pas convaincue, je cours tant que je peux, j’arrive au sommet, soulagée, un virage et elle reprends de plus belle ! Le morale flanche, je reprends la montée en courant, puis les jambes s’arrêtent toutes seules, je marche la fin, et là c’est le drame. Impossible de relancer. Marcher m’a été fatal, comme à Lyon, je commence à me sentir mal, à voir flou. Je ne comprends pas, j’ai mangé tous les 5 km un morceau de ma barre de céréales, j’ai bu, j’ai justement évité toutes ces erreurs, et je suis dans le même état ! J’ai la nausée, je n’arrive plus à manger ni boire, pire, j’ai de nouveau besoin d’aller aux toilettes.
J’envoie un message à Lucile, juste 3 mots : ça va pas. Elle m’encourage à marcher, reprendre en trottinant, ne pas arrêter, je suis une battante. Je m’assois sur le bord de la route, le temps que le mal être se dissipe un peu. Thierry essaye de m’emmener avec lui, je ne peux pas.
Hervé passe. Je m’accroche à lui, il m’encourage, regarde, on est tranquille, on s’en fout du chrono, je ferais quelques centaines de mètres avec lui, mais je n’arrive plus à suivre, je le laisse partir. Sandra, sa femme m’attends quelques mètres plus loin, m’encourage aussi, je suis à deux doigts de lui demander de m’emmener. Mais elle me devance en me disant qu’elle ne me le propose pas parce que je vais aller au bout. Je la laisse partir. Je m’arrête à un ravito, un peu d’eau, un peu de coca. Les bénévoles sont gentils, m’aident à me sentir mieux. Je vois la casquette rose de Nathalie. Je me sens mieux, je vais repartir avec elle.
Nathalie ne comprends pas ce que je fais là. Elle croit que j’ai fini. Je m’accroche à son rythme pendant quelques mètres, et pareil, je la laisse partir, je n’arrive pas à la suivre. Il ne faut surtout pas qu’elle gâche sa course à cause de moi. Claudio prendra le relais un peu plus tard, je trottine avec lui et n’arrive plus à suivre non plus. J’alterne marche et pause pour m’asseoir, je ne suis plus en état du tout.
Laurent, Thierry, Michèle, tous me doublent sans comprendre ce que je fais là. Je n’essaye même plus de les suivre. Corinne, blessée pourtant, arrive aussi, comme tous les autres, je la laisse partir.
On entre dans Lens, je pense regagner la ligne d’arrivée et m’arrêter au 40ème, je veux juste retrouver les copains, que ç’en finisse. Je ne veux pas chercher cette médaille, je ne la mérite pas. Je n’ai pas arrêté ma montre, elle tourne toujours. Je sors mon téléphone et regarde le plan. L’hôtel est à 1 kilomètre. J’ai froid, je sors ma couverture de survie et quitte le parcours et arrête enfin le chrono. Les derniers mètres jusqu’à l’hôtel me semblent une éternité. Pendant ce temps je reçois les notifications de tous les copains qui sont arrivés, des photos pleines de gens heureux avec leurs médailles. Je suis triste de ne pas participer à la fête. Ce n’est pas comme ça que j’avais prévu mon arrivée. Là je vais devoir affronter les regards, les questions de tous les copains… ben alors Camille, qu’est ce qu’il s’est passé ?